La pièce manquante du plus vieux labo photo du monde

La maison de Petiot-Groffier recelait un autre trésor…

Après le laboratoire sec, c’est le laboratoire humide de Petiot-Groffier qui a été retrouvé dans son ancienne demeure, complétant la découverte du plus vieux laboratoire photo du monde.
Un labo photo, même le plus ancien du monde, peut en cacher un autre. Pierre-Yves Mahé vient d’en faire – avec un grand plaisir on s’en doute – l’expérience.
En début d’année, le responsable de la Maison Niépce à Saint-Loup-de-Varennes avait déjà mis la main sur un véritable trésor. Le dernier héritier de Joseph-Fortuné Petiot-Groffier découvrait, dans la maison familiale de la région chalonnaise, au deuxième étage, caché derrière une porte restée close durant 152 ans, le laboratoire photographique de son ancêtre, le plus ancien au monde découvert intact à ce jour. C’est à Pierre-Yves Mahé, directeur de la Maison Niépce à Saint-Loup-de-Varennes, qu’il décide de confier la découverte : un véritable trésor (voir notre édition du 29 mai).
Sous le coup de l’émotion et pressé de dresser l’inventaire des centaines de pièces forcément d’époque retrouvées dans ce laboratoire, Pierre-Yves Mahé ne pousse pas les investigations dans la maison à la recherche de la pièce manquante. Car il manque en effet un élément important qui ne doit pas se trouver bien loin. Le laboratoire découvert permettait à Joseph-Fortuné Petiot-Groffier de travailler ses photographies mais en aucun cas de les développer : il manque la chambre noire, la pièce symbole même de la photographie.
Au cours d’un voyage aux États-Unis, Pierre-Yves Mahé présente sa découverte aux chercheurs de la Georges-Eastman House. Ceux-ci sont évidemment fascinés et s’interrogent aussitôt : « Mais vous n’avez pas trouvé le laboratoire humide ? ».
Rentré en France, Pierre-Yves Mahé décide donc de partir à la recherche du laboratoire perdu. Avec l’aide de l’héritier de Petiot-Groffier, il refait le tour de la maison, inspectant pièce par pièce, recoin par recoin.
Et c’est dans un simple débarras que l’on retrouve la fameuse pièce manquante. Au premier étage de l’habitation, derrière deux grandes portes battantes donnant sur une pièce entièrement plongée dans l’obscurité et qui avait été utilisée depuis des décennies pour entreposer divers matériels. Au fond de cette pièce, dans un angle, un évier. Juste à côté, l’emplacement d’une fenêtre se distingue. Soigneusement calfeutrée pour ne laisser filtrer aucune lumière. Sur l’un des panneaux, une petite trappe peut s’ouvrir en laissant passer la lumière au travers d’un filtre rouge, ce rouge inactinique utilisé encore dans les labos photos aujourd’hui car il ne fait pas réagir la pellicule.
« En regardant de plus près, on voit Petiot-Groffier travailler. On imagine son combat contre la lumière lorsque l’on analyse le système d’obturation de la fenêtre. Un premier équipement en bois, réalisé sur mesure par un ébéniste ferme la fenêtre, mais celui-ci n’était pas assez étanche et l’on remarque la feutrine clouée pour boucher les derniers interstices. Quant à la petite trappe, elle est bricolée avec de la ficelle et de la feutrine pour obtenir le résultat parfait », explique Pierre-Yves Mahé.
Un résultat si parfait que dans le fond de cette pièce, personne ne se doutait qu’une fenêtre pouvait exister.
Mais au-delà de la pièce chargée de symboles qui vient d’être retrouvée, Pierre-Yves Mahé a également remis la main sur certains objets manquant dans le premier laboratoire. Notamment des lampes inactiniques, qui permettaient d’éclairer les lieux sans gêner le travail du photographe.
La maison de Petiot-Groffier a sans doute désormais dévoilé tous ces trésors mais il reste beaucoup de travail aux chercheurs pour les analyser. Désormais, ils possèdent l’ensemble d’un laboratoire, intact, tel qu’il existait de 1840 à 1855.
C. Saulnier